Nancy Van Es, coordinatrice du collectif d’artisans CASMAU à Hagetmau
Des Pays-Bas à la Chalosse
Je suis responsable du collectif Casmau, qui rassemble huit entreprises de l’ameublement à Hagetmau. Aujourd’hui, je suis venue témoigner d’un partenariat fort avec le Kl’hub et Icifornie : ensemble, nous avons lancé une formation de couturière d’ameublement ici, à Hagetmau.
Nous sommes arrivés en Chalosse en 2008, mon mari et moi. Originaires des Pays-Bas, nous avions fait un choix : celui de la qualité de vie. Là-bas, le quotidien devenait trop américanisé, trop rapide. Nous cherchions un autre rythme, plus tranquille. Et nous l’avons trouvé ici.
S’ancrer dans un territoire
Il fallait aussi construire une vie professionnelle. Alors, nous avons ouvert un hôtel et un restaurant à Saint-Cricq-Chalosse.
Plus tard, je suis devenue cheffe d’entreprise dans l’ameublement à Hagetmau.
Petit à petit, j’ai découvert que je pouvais jouer un rôle, ici, que ma culture hollandaise pouvait devenir un trait d’union entre les gens.
J’aime profondément cette région. Elle est vraie, simple, authentique. C’est une joie d’y vivre au quotidien, même si, dans la sphère professionnelle, les défis ne manquent pas.
Se connaître pour coopérer. Se connaître pour durer.
C’est ma conviction : la première étape, c’est se connaître.
Ici, les gens vivent parfois à cinq kilomètres les uns des autres, mais ils ne se croisent pas, ils ne se connaissent pas. Il y a quelque chose de culturel, presque invisible, qui empêche parfois le lien.
Une entreprise, comme une personne, ne peut pas grandir sans tisser des relations autour d’elle.
Même entre Hagetmau et Mugron, on sent une frontière. Pas une frontière géographique mais plutôt psychologique. C’est dommage, car la coopération commence là : dans la rencontre.
Avec le collectif Casmau, on l’a expérimenté.
Cela fait six ans que le groupe existe. Aujourd’hui, on se connaît bien.
Quand les liens sont là, les problèmes trouvent plus facilement leurs solutions.
Ce qui relie
Il faut quelqu’un, une entreprise, une main tendue pour faire lien.
C’est ce que j’ai proposé, il y a six ans. Nous avions tous un point commun : l’ameublement, et un lieu d’exposition partagé : le salon de la chaise à Hagetmau.
C’est là qu’on a commencé à se parler. De simples échanges d’exposants, puis des idées. Et ces idées sont devenues des actions communes.
Nous avons organisé de petits événements. Et puis, pendant le Covid, le salon a été annulé. Alors nous avons inventé la route de la chaise : chaque atelier ouvrait ses portes au public.
Ça a été un succès, parce qu’on l’a fait ensemble.
Coopérer ou se concurrencer ?
Au départ, beaucoup avaient cette peur : « nous sommes concurrents. »
Mais quand on se rencontre, qu’on se parle, on découvre autre chose : qu’on est complémentaires, qu’on vit les mêmes réalités, qu’on partage les mêmes questions.
Six ans plus tard, on travaille sur des projets qu’on n’aurait jamais imaginés au début.
Et ça, c’est la force d’un collectif.
Un rêve pour demain
Aujourd’hui, avec le collectif, nous avons un rêve : créer un atelier partagé.
Quatre entreprises, sous un même toit. Surtout des petites structures, parfois très isolées.
Depuis qu’elles sont dans le collectif, elles disent : « je ne suis plus seule, et je suis plus attractive pour les jeunes. »
Il faut penser à l’avenir. Nous avons tous autour de 50 ans. Il faut attirer une nouvelle génération, et pour ça, il faut évoluer.
Notre rêve, c’est cet atelier mutualisé, et aussi un investissement dans le numérique, des moyens partagés.
Seuls, on n’y arrivera pas. Mais ensemble, et avec le soutien des grandes entreprises du territoire, oui, c’est possible.
Rêver plus loin : abattre les frontières
Mon rêve, à moi, va plus loin.
J’aimerais que les frontières politiques locales s’effacent.
Ce ne sont pas des murs visibles, mais ils freinent. Ils empêchent des projets de naître.
Dans le tourisme, je le vois : un touriste ne connaît pas les limites administratives.
Il se promène, il découvre. Pourquoi ne pas penser notre territoire de la même manière ?
Ouvrir la Chalosse. Élargir les possibles.
Tisser des ponts avec de nouveaux partenaires
Le partenariat entre le Kl’hub et Casmau, c’est déjà une belle preuve de ce que peut apporter l’ouverture.
Grâce à ce service de conciergerie de formation solidaire, nous pouvons nous concentrer sur notre métier : l’artisanat.
Aujourd’hui, le partenariat porte sur la formation couture, mais demain, pourquoi pas le bois, ou d’autres savoir-faire ?
S’associer, c’est permettre à chacun de garder sa spécialité. Et c’est précieux.
Il est essentiel d’avoir un relais entre les centres de formation et les entreprises. Parce que nous ne pouvons pas tout faire.
Nous sommes déjà fortement sollicités, notamment avec les normes.
Personnellement, ça m’aide énormément : je ne suis pas là pour monter des dossiers pédagogiques. Mon métier, c’est de fabriquer et vendre des meubles.
Former, oui, c’est vital. Mais on a besoin de soutien.
Et ce partenariat, c’est exactement ce qu’il nous fallait.
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